Joey Barton, le bad boy de Marseille Publié le 01.09.2012 à 07:30 par Johann Alessandroni • 0 réaction
Après avoir découvert la Commanderie, Joey Barton est à présent, officiellement, un joueur de l’Olympique de Marseille. Ce personnage atypique et complexe ne mettra jamais tout le monde d’accord. Entre ses déboires sur et en dehors du terrain, ses performances de footballeur et son charisme, Barton est un homme aussi bien aimé que détesté. Retour sur sa carrière, son parcours, ses exploits et ses ratés ainsi que sur son profil.
« D’autres clubs sont venus mais je veux jouer seulement pour Marseille. C’est un club pour moi. » Le « roi du tweet », Joey Barton, pose donc ses valises sur la Canebière après de nombreux rebondissements. Souvent pointé du doigt pour ses frasques, son épopée reste assez mystérieuse. Il faut dire qu’à bientôt 30 ans (il les fêtera le 2 septembre), Barton a déjà marqué toute l’Angleterre, par ses déboires mais aussi par son talent. Joey Barton
Joey Barton a passé 10 ans à Manchester City. L’enfant de Liverpool chez les Citizens
Joey Barton est né à Huyton, dans un quartier pauvre de Liverpool, le même que Steven Gerrard, pour qui il a énorme respect. « Il s’agit d’un des 10 pires endroits où vivre au Royaume-Uni« , dixit le joueur. Dans une enfance difficile, il ne jure que par le football. Il décide qu’il sera footballeur à 7 ans. A 16 ans, le nouveau directeur du centre de formation d’Everton le juge trop petit et ne le fait pas signer professionnel. Dans le même temps, ses parents divorcent. Mais dans la foulée, Manchester City sent le coup et signe le joueur, revanchard à souhait. Petite anecdote, après Arsenal, c’est contre Everton qu’il prendra le plus de cartons jaunes. Lorsqu’il arrive à Manchester, il découvre la ville mais avant tout une majorité de personnes qui ne vivent que pour l’équipe adverse, United. Il réussit à s’incruster chez les U18, puis devient rapidement capitaine de la réserve avant de se faire sa place en équipe première. Son premier match se déroule le 5 avril 2003, face à Bolton, avant d’inscrire deux semaines plus tard son premier but contre Tottenham.
Après des débuts convaincants, il est confirmé par Kevin Keagan au sein de l’équipe première. Il devient un titulaire régulier et trouve sa place au côté de Paul Bosvelt (28 apparitions en championnat et un nouveau but). Remarqué, il est appelé avec les -21 anglais. Au terme de la saison, Barton est élu « Young Player of the Year » du club. Devenu incontesté au milieu de terrain, il garde son statut de titulaire malgré des déboires (lire ci-dessous) et une demande de transfert rejetée en janvier 2006. Fin 2006, malgré l’intérêt de David Moyes, l’entraîneur d’Everton, il reste à City où il tient une belle forme. Il est récompensé par une sélection, la seule de sa carrière, avec la sélection anglaise contre l’Espagne le 7 février 2007 en match amical en remplaçant Franck Lampard à la 78e minute. Après un nouvel incident le 1er mai 2007 avec Ousmane Dabo (lire ci-dessous), sa relation avec Stuart Pearce est brisée. Joey Barton est convié à partir. Joey Barton
La hargne de Joey Barton n’est plus à démontrer, il donne tout, parfois un peu trop, sur un terrain de football. (people.uk) Blessures, déboires et coups de canon
Newcastle remporte la mise pour €8 millions, malgré l’intérêt de West Ham. Les débuts ne sont pas faciles pour Barton puisqu’il se blesse lors du deuxième match amical du club pour une durée de 6 semaines (fracture du cinquième métatarse). Après quelques complications, il débute enfin officiellement avec les Magpies le 22 octobre 2007 contre Tottenham. Entre ses problèmes physiques, un séjour en prison et des suspensions (lire ci-dessous), le milieu de terrain anglais n’a pas l’occasion de s’affirmer comme un cadre de l’équipe durant ses deux premières saisons. Il faut dire que sa saison 2009/2010, en Championship, n’est guère plus brillante. Il ne s’entend absolument pas avec Alan Shearer, n’hésitant pas à le qualifier de « manager de merde avec des tactiques de merde. » Pourtant, il revient ensuite, lorsque la situation s’est enfin apaisée, mais est obligé de jouer ailier gauche devant la forme de Danny Guthrie et Kevin Nolan. Il a enfin l’occasion de montrer, lors du retour de Newcastle en Premier League, qu’il a le niveau et le talent pour s’imposer ici. Buteur lors de la seconde journée face à Aston Villa, cette victoire signifie aussi le rasage de moustache pour Barton. En effet, le joueur avait promis de la raser lors de la première victoire des Toons dans l’élite ! Malgré quelques ennuis avec Gamst Pedersen et Torres notamment (lire ci-dessous), il participe à 32 matchs de Premier League et reste un des acteurs phare de la bonne saison de Newcastle (12e place).
Sur le départ, Barton se fait remarquer avant de partir face à Arsenal où Gervinho le prend à parti. Une semaine plus tard, le 26 août 2011, il signe aux Queens Park Rangers. Barton a révélé qu’il devait signer à Arsenal, mais que cet incident a mis fin à ses espoirs de rejoindre l’équipe d’Arsène Wenger. Dès son arrivée, il prend le brassard de capitaine, signe de la confiance de Neil Warnock. Il marque son premier but face à Wolverhampton avant de se confronter physiquement à Karl Henry avec qui il avait eu une première altercation en août 2010 quand Barton l’avait accusé de « vouloir blesser des gens. » L’arrivée de Mark Hugues ne change rien, Barton reste capitaine malgré un carton rouge, injustifié, contre Norwich. Contre Liverpool, lors de la victoire 3-2 de son équipe, il est remplacé sous les applaudissements du public, heureux de le voir enfin sortir ! Barton confirme que sa performance était certainement la pire de toute de sa carrière, mais ne se prive pas pour critiquer aussi les supporters et estime qu’ils ne soutiennent pas assez l’équipe pour se sauver. Contre Arsenal, QPR l’emporte 2-1 et réalise à cette occasion un excellent match, de quoi se faire pardonner puisqu’il est, cette fois, ovationné, tout un symbole. Lors de la dernière journée de Premier League, le 13 mai 2012, Barton se fait remarquer une dernière fois face à Manchester City avec un nouvel incident avec Carlos Tevez et Sergio Agüero. Mark Hugues lui retire son statut de capitaine et n’obtient pas de numéro pour la nouvelle saison. Il a à présent tenter d’écrire une page plus glorieuse avec l’Olympique de Marseille. Joey Barton
Joey Barton est en pleine discussion avec Howard Webb, le cousin anglais de Tony Chapron. (BBC) La clinique de la rédemption
Son premier carton rouge, Barton le reçoit dans un match de FA Cup contre Tottenham en avril 2003 durant la mi-temps après des mots auprès de l’arbitre. Bad boy invétéré, Joey Barton provoque une bagarre lors d’un match amical face à Doncaster en juillet 2004. Quelques mois plus tard, lors d’une fête organisée par le club pour les fêtes de Noël, il éteint son cigare dans l’œil de son coéquipier, Jamie Tandy, après l’avoir surpris en pleine séance de pyromanie avec son t-shirt. Il présente ses excuses et reçoit une amende équivalent à six semaines de salaire. En mai 2005, il casse la jambe d’un piéton de 35 ans au volant de sa voiture dans le centre-ville de Liverpool. Alors que Manchester City est en pleine tournée en Asie, Barton est renvoyé en Angleterre après avoir tenté d’agresser un jeune Thaïlandais fan d’Everton de 15 ans qui l’a insulté et frappé au tibia. Richard Dunne s’interpose et le jeune fan est hors de danger. Suite à cet événement, le joueur est envoyé dans un camp d’aide aux sportifs, Sport Chance clinic, créé par Tony Adams, l’ancien Gunner.
Cette cure lui a visiblement fait le plus grand bien, Barton semble vraiment avoir changé. Il fait toutefois à nouveau parler de lui en septembre 2006 en montrant ses fesses aux supporters d’Everton, après l’égalisation des Citizens au Goodison Park dans le temps additionnel. Le deuxième carton rouge intervient en décembre 2006 après un tacle les deux pieds décolés sur Abdoulaye Diagne-Faye. Quelques mois plus tard, il est soupçonné d’avoir agressé un chauffeur de taxi dans Liverpool, mais il a depuis été blanchi. Un nouvel incident intervient le 1er mai 2007. Barton tacle violemment Ousmane Dabo à l’entraînement, le milieu de terrain français lui répond de la même manière. Les insultes fusent et Barton met alors un coup de tête à Dabo. Il est conduit à l’hôpital où de nombreuses contusions au visage et un décollement de la rétine sont diagnostiqués après que le bad boy lui ait asséné de nombreux coups. Joey est condamné à 4 mois de prison avec sursis, 200 heures de travaux d’intérêt général et une amende, il est également suspendu pour 6 matchs par la FA et 6 autres avec sursis. Gervinho - Joey Barton
Gervinho a craqué face à Joey Barton pour son premier match en Premier League. L’art de la provocation
Fin 2007, alors que Barton a signé à Newcastle, il est condamné à six mois de prison pour avoir frappé deux hommes à la sortie d’une boite de nuit à Liverpool. L’Anglais admet devant la cour qu’il est alcoolique et qu’il veut se soigner. Il est libéré de prison après avoir passé 77 jours sous les barreaux. A son retour, il accueille Samir Nasri, nouvelle recrue des Gunners, d’un tacle bien appuyé mais correct. Le Français lui répond par un nouveau tacle pour lequel il est expulsé. Barton est alors accusé par Gabriel Agbonlahor, attaquant d’Aston Villa, de propos raciste à son égard. Ces allégations poussent la FA à valider ses 6 matchs de suspension qui lui pendaient au nez avec le sursis. Cependant, l’analyse par des professionnels a révélé que les propos de Barton n’avaient rien de raciste. Après un nouveau carton rouge pour un tacle sur Xabi Alonso le 3 mai 2009, Joey écope de trois nouveaux matchs de suspension. Lors de la saison 2010/2011, il assène un coup de poing à Morten Gamst Pedersen pour lequel il prend trois matchs et est accusé de propos homophobes envers Fernando Torres. Il provoque également l’expulsion d’Abou Diaby après un tacle appuyé sur le Français tout comme celle de Gervinho lors du début de saison suivant. Son dernier fait d’arme, lors du dernier match de la saison dernière face à Manchester City. Il donne un coup de coude à Carlos Tevez, bien que l’Argentin en rajoute, et frappe Sergio Agüero après avoir été expulsé. Condamné par les médias, son attitude est à nouveau pointée du doigt. Il reçoit alors une suspension de 12 matchs dont il lui reste encore 9 à purger. Un méchant, Barton ?
L’homme s’est assagi, il parle de tout sur son compte Twitter, pas seulement un personnal Branling par rapport à d’autres qui parlent de leurs titres ou vacances. Il est devenu papa, en décembre dernier. D’un petit Cassius, en l’honneur de Cassius Clay, le premier nom de Mohammed Ali. Cela ne s’invente pas. Mais parlons de ses écarts sur le terrain. De nombreux Top 5 de ses pires actions sont disponibles. Tacles violents, juste vilains. Cette mode du XXIe siècle de réduire un footballeur à une vidéo de highlights de 5 minutes ne prouvent en rien le niveau de celui-ci. Mais parlons statistiques :
Joey Barton : 226 matchs en championnat/ 62 cartons jaunes (0,27cj/matchs) / 5 cartons rouges (0,022cr/matchs) Alou Diarra : 309 matchs en championnat / 70 cartons jaunes (0,22cj/matchs) /5 cartons rouges (0,016cr/matchs) Thiago Motta : 199 matchs en championnat /54 cartons jaunes (0,27cj/matchs) /8 cartons rouges (0,041cr/matchs) Lassana Diarra : 131 matchs en championnat / 42 cartons jaunes (0,32cj/matchs) / 3 cartons rouges (0,022cr/matchs)
Et en Ligue 1, pour nos phénomènes :
Franck Jurietti : 345 matchs en championnat / 89 cartons jaunes (0,25cj/matchs) /6 cartons rouges (0,017cr/matchs) Cyril Rool : 353 matchs en championnat / 156 cartons jaunes (0,44cj/matchs) / 22 cartons rouges (0,062cr/matchs) Cyril Jeunechamp : 380 matchs en championnat /106 cartons (0,27cj/matchs) / 18 cartons rouges (0,042cr/matchs)
De quoi réfléchir un peu sur la réputation du bad boy qui l’entoure, pas forcément plus violent qu’un autre. Même s’il a toujours joué dans une équipe qui jouait le maintien ou presque. Dans une équipe où l’on défend plus que l’on attaque, les fautes, intelligentes ou non, sont légions. Si les deux feuilles de statistiques ci-dessus tentent de prouver que Joey Barton n’est qu’un joueur comme les autres, il détient néanmoins un triste record. Il s’agit de l’homme qui a pris le plus de carton l’année dernière en Première League (12 : 10 cartons jaunes + 2 cartons rouges). Olympique de MarseilleUn box to box à l’OM
Mais, bien avant d’être un bad boy, Joey Barton reste un footballeur. Et qui plus est, un élément talentueux. Il est considéré comme un des meilleurs médians d’Angleterre, se déclarant lui-même supérieur aux deux monstres sacrés que sont Lampard ou Gerrard. Aujourd’hui à Marseille, le club a pris un risque. Tout d’abord du fait des 9 matchs de suspension encore à purger. Aussi, on ne sait pas encore dans quel état et le nouveau joueur après ne pas s’être entrainé de façon professionnelle depuis fin mai. Enfin, le club n’est pas sans savoir que sa dureté sur le terrain pourrait lui coûter cher en cas de nouvel écart, surtout lorsque l’on voit les mesures prises par la LFP en ce début de saison pour durcir les règles contre les joueurs. Le joueur, lui, a toujours eu Marseille dans un coin de sa tête : « A Newcastle, la ville est à 100% derrière le club. En France, il y a peut-être un club, Marseille, sauf qu’à Marseille, il y fait chaud. » C’est aussi un homme intelligent et cultivé, qui se passionne pour l’art et la philosophie. Dans un quartier aussi malsain, Barton a gardé un côté impulsif, c’est indéniable, mais c’est aussi une personne étonnante lorsque l’on s’intéresse un peu à autre chose que ses déboires. Son caractère de leader pourra faire un bien fou au club qui en manque cruellement depuis les départs de Gaby Heinze ou de Alou Diarra. Les supporters devraient apprécier son côté bagarreur qui ne lâche rien et il ne serait pas étonnant que le joueur devienne l’un des chouchous du Vélodrome. Enfin, financièrement et malgré un gros salaire, le merchandising autour du joueur pourra être intéressant tant pour la visibilité du club que sur les ventes de produits (maillots, billets). Un box-to-box arrive donc en France comme l’explique Elie Baup : « C’est le principe anglais du box to box, qui va d’une surface à l’autre. Il a une grosse activité sur le terrain, dans les courses et la mobilité. Il a aussi un gros potentiel dans la récupération. C’est le genre de joueurs qui permet à une équipe de jouer haut, de continuer, à la perte de balle, de la récupérer le plus vite possible. Il y a aussi l’utilisation du ballon, l’amener assez haut sur le terrain. C’est le profil de ces joueurs qui comblent beaucoup d’espaces et qui courent beaucoup. » Son profil sied parfaitement avec la philosophie de jeu prôné par Elie Baup depuis le début de saison. Il est vrai que son activité, sa qualité de passes longues et sa frappe de balle vont apporter un plus au milieu de terrain olympien. Bad boy, personnalité atypique, psychopathe pour certains, Joey Barton est avant tout un joueur de football, à lui de le démontrer ! Pour finir, quelques citations…
« Si j’avais lu sur quelqu’un tout ce que j’ai pu lire sur moi, je n’aurais pas eu une bonne image de lui. » « C’est moi contre toi, tu joues milieu de terrain ? Moi aussi. Si je te domine, mon équipe gagnera. Si c’est toi, ton équipe gagnera. » « Si tu peux intimider psychologiquement l’adversaire, tu dois le faire. Le tacle en fait partie, c’est une forme d’art. » « Il a commencé la bagarre, mais il ne l’a pas terminé. Il avait un oeil au beurre noir, un peu de sang au bord des lèvres, mais il n’est pas mort non plus ! » « Sans toutes les affaires sombres de mon passé, je ne serai pas l’homme que je suis aujourd’hui, et je suis fier de ce que je suis devenu. Mais j’essayerai de faire certaines choses différemment… »
Article réalisé en collaboration avec Anne-Lise Furnémont, Alexandre Birraux et Baptiste Binet
_________________ "Tudor n’a aucune raison de l’aligner, ça peut être que mauvais pour lui si Payet est bon" "Anigo: tactiquement il est au dessus de Tudor"
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