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Alors que le Qatargate menace d'exploser à la face de ses principaux protagonistes à la suite des révélations faites par France-Football, Vincent Riou, journaliste à So Foot, rappelle que son magazine s'était fait très tôt l'écho de possibles accusations de complaisance des institutions quant à la candidature du Qatar pour accueillir la Coupe du monde 2022. Alors chef de l'Etat, Nicolas Sarkozy, y apparaît comme un personnage central.
Comment réagissez-vous au scoop de France Football?
Nous avions à So Foot sorti un article dans notre numéro de juillet 2011, donc vraiment dans la foulée de l’achat du PSG par le Qatar, sur les coulisses de cette opération que nous avions titré «Le PSG, le Prince et le Petit homme». Nous y révélions déjà que le 23 novembre 2010, à l’Elysée, «les tractations entre le Qatar et le PSG sont à l’ordre du jour d’une réunion entre Nicolas Sarkozy, premier supporter du club de la capitale, et Cheikh Tamim. Ce même jour, le président de la République a reçu Michel Platini. Lequel est cordialement invité à participer au déjeuner entre les deux hommes d’Etat. D’après des sources proches du dossier, c’est là que Sarkozy, averti des réticences de Platini sur la candidature qatarie, suggère au président de l’UEFA de reconsidérer sa position sur le sujet.'Il m’a dit que les Qataris étaient des gens biens', élude ce dernier. Une habile manœuvre qui aura son importance quand l’hyper président se penchera au chevet de son club préféré. Dix jours plus tard, en effet, le 2 décembre, Platoche vote Qatar et la planète entière apprend que la Coupe du monde 2022 se jouera sous 40 degrés à l’ombre». Par la suite, le 25 avril 2011 pour être précis, quand la piste qatarie pour le rachat du PSG semblait sentir le roussi, nous avions aussi révélé qu’un «Sébastien Bazin en petite forme» (il est le représentant en Europe de Colony Capital, l’actionnaire majoritaire du PSG à l’époque) avait été reçu par Sarkozy à l’Elysée. Donc la dimension politique de ce rachat était déjà connu depuis un an et demi, en tout cas des lecteurs de So Foot. L’énorme révélation, c’est, je le répète, les chiffres qui circulent sur le prix du soutien de Platoche.
Et qu’est-ce que cela vous inspire?
Dès 2011, le président de la fédération allemande de football, Theo Zwanziger, s'était prononcé pour un réexamen de la procédure d'attribution en raison de soupçons de corruption. Tout le monde savait que la manière dont cette Coupe du monde 2022 avait été attribuée était une bombe à retardement qui, si elle explosait, pouvait anéantir tous les efforts du Qatar. D’ailleurs dans ce même article, Pierre Terzian, directeur de Pétrostratégies, nous expliquait que 'pour devenir important lorsqu’on est tout petit, il faut acquérir visibilité, notoriété et respectabilité. Quand vous êtes devenu important pour quelqu’un, ce quelqu’un vient vous défendre en cas de problèmes, et on ne vous dérange plus'. Il parlait de géopolitique bien entendu, mais nous avions traduit cela dans un langage footballistique et écrit: «si jamais, dans les dix prochaines années, preuve était faite d’éventuels faits de corruption dans l’attribution de la Coupe du monde 2022 – ça serait dingue, mais sait-on jamais –, la «grande famille du football» serait sans doute bien gênée pour dénoncer cette nouvelle puissance nourricière». Je pense que dans leur pire cauchemar, les Qataris n’avaient pas imaginé que les révélations sortent si tôt, et surtout que Platini soit mouillé directement…
La situation vous paraît-elle à ce point explosive?
Disons que pour leur communication foot en France, il va falloir penser à vite remplacer Leonardo par Anne Méaux (présidente-fondatrice d'Image 7, une société de conseil en communication)! Sur Platini en particulier, j’ai du mal à comprendre l’idée selon laquelle la contrepartie de son soutien était que le Qatar investisse dans le PSG. A ma connaissance, le grand supporter du club parisien dans cette histoire c’était Sarko, pas Platoche. Les supporters de Paris se souviennent d’ailleurs que le joueur avait refusé les offres de Francis Borelli de signer au PSG. Et en temps que président de l’UEFA, il avait déclaré à qui voulait l’entendre tout le mal qu’il pensait du rachat du PSG par le Qatar. Du coup, on peut s'attendre à ce que Platini se défende façon Richard Virenque lors de l’affaire Festina. Et après tout, si les contreparties de son soutien dépassaient le cadre du foot comme France Football le laisse entendre (création d'une chaîne pour affaiblir Canal, augmentation des parts qataris dans le capital de Lagardère), peut-être a-t-il véritablement été corrompu à l’insu de son plein gré?
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