http://www.mediafootmarseille.fr/actual ... ans-espoirJeunes et sans espoir
En se séparant d'Abdullah et Azouni, l'OM fait une croix sur deux joueurs prometteurs issus de son centre de formation. Le club marseillais ne jurait-il pas qu'il comptait sur ses minots ?
Il y avait la génération perdue, celle de 1991-1992, aura-t-on la génération sacrifiée ? Celle de 1993-1994. Au dernier jour du mercato, le 2 septembre peu avant minuit, les départs de Raffidine Abdullah et de Larry Azouni ont autant surpris les intéressés qu'interpellé les observateurs, entourages et formateurs y compris.
Alors qu'ils représentaient l'avenir de l'OM et que les dirigeants les avaient érigés en symbole de la confiance placée sur les jeunes, les deux milieux de terrain de 19 ans ont été expédiés au FC Lorient dans le cadre d'un échange avec Mario Lemina. Cette opération intrigue d'ailleurs sur le plan financier : Lemina est transféré pour 4 millions d'euros, une somme conséquente pour un gamin de 20 ans aux 18 apparitions en Ligue 1. Surtout au regard de la somme encaissée avec la vente d'Abdullah : 500.000 euros ! Le prêt d'Azouni est assortie d'une option d'achat identique de 500.000 euros.
Labrune a pris la décision
Selon nos informations, c'est Vincent Labrune en personne qui a pris la décision de réaliser cet échange. Le président de l'OM est tombé sous le charme de Mario Lemina. Il estime que ce joueur, qui a éclos au printemps en Bretagne, est bien supérieur à Abdullah et Azouni. Les deux minots ont encaissé la décision de manière différente.
Lundi, Azouni était en partance pour Luzenac (National) lorsque ses dirigeants lui ont indiqué la direction de Lorient. Le brillant finaliste du dernier Euro U19 aurait bien accueilli la nouvelle. Pour lui, évoluer en L1 sous les ordres de Christian Gourcuff est un bond en avant. En incluant une option d'achat modique, l'OM assume le risque de le voir exploser sous d'autres cieux. En revanche, pour Raffidine Abdullah, c'est une autre chanson. Le jeune milieu, qui avait signé son premier contrat pro en juin, s'attendait à un prêt quand il a vu sous son nez un contrat de trois ans au FCL. Révélation du début de l'ère Baup, Abdullah a été liquidé sans sommation. "On a été mis devant le fait accompli", soufflait un proche quelques minutes après l'accord. Le rêve d'Abdullah de s'imposer à l'OM s'est envolé.
Lemina est-il plus fort qu'Abdullah ?
Par ces décisions, quel message lance Vincent Labrune ? En 2012, après le départ de Didier Deschamps, alors que l'OM n'avait plus un kopeck, les dirigeants assuraient que désormais les jeunes auraient leur place. Un an plus tard, si plusieurs jeunes issus du centre de formation ont été lancés par Elie Baup, le départ Raffidine Abdullah marque une rupture. Les gamins des catégories inférieures, qui voyaient dans la trajectoire du Comorien un exemple à suivre, peuvent détourner le regard. Comment justifier que l'OM recrute Lemina qui compte moins d'apparitions en professionnel qu'Abdullah (18 contre 24) moins âgé d'un an ? Surtout quand la victime collatérale est un Marseillais de naissance, qui a grandi dans les quartiers nord, dont le comportement a été exemplaire... "On est dégoûté", lâche un représentant du centre de formation.
Les jeunes du centre condamnés ?
A travers cette stratégie, Labrune démontre qu'il ne croit pas dans les vertus de la formation à la marseillaise. Tout du moins celle dont les fruits tombent aujourd'hui. La refonte totale de l'organisation du centre de formation avec la nomination de Thomas Fernandez obéit à une vision à moyen et long terme. Dans l'immédiat, Labrune a choisi d'acheter le produit fini d'une pépinière. Celle du Havre, de Lorient ou de Guingamp... Alors que Paris et Monaco ne s'y intéressent pas, le président a préféré investir massivement dès cette année sur ce marché des espoirs pour profiter du vide laissé par ses rivaux lyonnais et lillois désargentés. Au risque de boucher la route aux jeunes pousses marseillaises élevées sur les hauteurs de la commanderie...
En contemplant le sort réservé à leurs compagnons, les Andonian, Abergel, Aloé et autres Araai, annoncés comme la relève, peuvent s'inquiéter... Avant Abdallah et Azouni, Ammari, Mango et Gadi avaient pris la porte. Oseï et Ndoumbou c'est pour bientôt. Omrani est déjà un ex-espoir. En janvier, l'arrivée de Brice Samba avait bouché l'horizon des gardiens les plus prometteurs Fabri et Escales. A l'OM, les jeunes sont bien utiles lorsqu'il s'agit de sauver le club comme en 1981 ou 1994 voire lorsque les caisses sont vides. Mais dès que l'ambition ressurgit, le naturel d'un club avide de strass revient au galop...
Ivan Bonet, à Marseille